Une approche sociologique de la Guyane française. Crise et niveau d’unité de la “société créole”

Tour à tour Eldorado ou guillotine verte, pays de l’or ou du bagne, la Guyane est longtemps demeurée inconnue sous ses mythes et ses scandales.
Elle l’est encore aujourd’hui, comme l’atteste la pauvreté de la bibliographie locale : seules, ses populations tribales ont fait l’objet d’études approfondies ; pour le reste, quelques rares tentatives isolées n’en donnent jamais qu’une vision fragmentaire.

En y entreprenant une recherche sociologique, nous avons du faire, avant tout, un travail de prospection, au plein sens du terme, car dès d’abord, la Guyane se distingue par son caractère d’exception.

Lointaine possession française d’Amérique, elle apparait comme le point de rencontre spécifique d’un milieu et d’une double histoire. Ce n’est ni un pays d’Amérique du Sud comme les autres, ni une colonie française comme les autres : le problème indien est un problème de minorité ethnique ; sa population est issue de l’esclavage des noirs africains.

Négligée par la France qui n’a jamais su y poser les bases d’une implantation solide et réfléchie, elle a été victime de ses propres richesses : l’or ne pouvait que désorganiser une économie et une société en pleine gestation. La crise qu’elle connait aujourd’hui n’est que l’aboutissement d’une longue suite de conflits.

Dès lors, toute approche sociologique de la Guyane doit partir de cette originalité qui la détermine, et qui, seule, permet de mettre en relief la dialectique des situations dont elle est la résultante.

Dans le cadre de ce bref article assez théorique, nous consacrerons toute notre Premiere partie à définir l’originalité de la Guyane. Puis, nous tâcherons de montrer, à l’aide d’exemples précis, le caractère déterminant de ces situations passées en regard de la situation actuelle, que nous analyserons, en dernier ressort, comme une réponse inévitable aux contradictions précédentes.